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La noirceur de l'âme chapitre 1 Partie Finale

Au loin, dans les montagnes septentrionales du Sud, au-delà des frontières explorées, se trouvait le palais de la Grande Sorcière Eryn. Magnifique château construit avec des pierres blanches, d'innombrables fenêtres, des sculptures à n'en plus finir, des chaînes en or retenant le pont-levis, tout à l'extérieur du château respirait la beauté, même la forêt autour semblait enchantée. L'intérieur du palais était très différent. La citadelle était très sobre. Il manquait d'éclairage partout malgré les fenêtres qui laissaient entrer la lumière du soleil. Soudain, un cri à vous glacer le sang retentit. Il provenait de salles de tortures situées à l'étage inférieur. Habituellement, cela sonnait comme une douce mélodie aux oreilles de la sorcière. Mais pas cette fois.

Eryn était dans tous ses états. Elle n'avait jamais été dans une telle fureur depuis fort longtemps. Elle savait, de source sûre, que le roi Uthgard était au courant de ses projets et qu'il avait même recruté une bande de morveux pour l'arrêter. Elle tentait de se calmer en échafaudant des plans machiavéliques pour se débarrasser de ces jeunes crétins lorsqu'une idée lui traversa l'esprit. Eryn se dirigea d'un pas assuré vers la fenêtre se trouvant dans la salle du trône, et s'y accouda. La méchante reine respira profondément, leva le regard vers le ciel et soupira. Soudainement, ses yeux devinrent entièrement blancs. Elle poussa un puissant cri vers un groupe d'esclaves se trouvant sur les contreforts, près du château. L'effet fut immédiat. Une puissante explosion éradiqua entièrement les pauvres êtres qui se trouvaient à cet endroit. Il s'agissait d'un moyen qu'avait trouvé Eryn pour se détendre, déchaîner sa fureur sur ses subordonnés. Elle en avait une quantité incroyable dans ses cachots, alors une dizaine de plus ou de moins, elle n'y voyait aucun problème.

Lorsqu'elle fut enfin calme, la puissante Eryn alla s'asseoir sur son trône et fit mander son bras droit. Elle portait un justaucorps sans manches, noir avec un col roulé rouge, un pantalon souple noir et une paire de bottes. La jeune femme portait un grand manteau rouge par-dessus avec un collet remontant derrière sa tête et encadrant une imposante chevelure de flammes. Eryn était ensorcelante, assise sur son trône en attendant la venue de son meilleur mercenaire. Celui-ci, toujours ponctuel, arriva quelques minutes après avoir reçu l'appel. Il entra dans la pièce et se prosterna juste devant sa maîtresse.

 

 — Vous m'avez fait mander, ma reine.

— Oui, je t'attendais Damien, j'ai une mission pour toi mon formidable assassin.

Damien pencha la tête pour montrer qu'il écoutait parfaitement.

— Je veux que tu ailles à Tarvath et que tu élimines les sales mioches que le souverain a recrutés. Tu les égorges, tu les étripes, tu les brûles, tu peux même les dépecer, je m'en moque, je veux qu'ils meurent ! Il y a aussi une magicienne avec eux, occupe-t'en également.

— Comme il vous plaira Grande Souveraine.

 

Damien s'inclina et sortit de la pièce. Il regagna ses appartements et commença à préparer ses bagages pour son long voyage. Eryn soupira. Elle savait pertinemment que son bras droit souhaitait quelque chose de plus prestigieux que d'assassiner des enfants. Elle aurait bien voulu lui éviter cette basse besogne, mais Konstantin, son propre fils, refusait obstinément de collaborer. Il préférait gouverner son propre royaume plutôt que de gouverner avec sa mère. Elle commençait à avoir la migraine rien qu'à penser à son fils et une image de lui pendu à une corde la fit sourire. Soudain, le tonnerre gronda. Elle ferma les yeux, inspira longuement et chanta une formule magique. Le ciel s'éclaircit pour laisser passer un soleil radieux. Pour la première fois depuis longtemps, Eryn était sereine. Elle affichait un magnifique sourire, dévoilant une dentition parfaite et blanche. Mais cela n'était pas toujours bon signe pour les domestiques, puisqu'elle avait souvent des envies meurtrières durant ces moments de sérénité. Ses réflexions furent interrompues par l'arrivée de ses domestiques.

 

— Maîtresse, pouvons-nous commencer ? demanda une porte-parole, tremblante.

 

Eryn les regarda et hocha la tête. Les servantes se déplacèrent rapidement et commencèrent à prodiguer des soins pour la magnificence de leur Dame. Elle aimait bien se refaire une beauté pour son simple plaisir.

 

— Aïe, dit Eryn tout à coup.

— Je suis désolé, Votre Grandeur, je vous prie de me pardonner, ceci ne se reproduira plus.

— Tu as tout à fait raison, et tu veux savoir pourquoi ? Parce que je suis lasse de voir ton misérable visage de ver de terre.

 

Sans prévenir, les yeux de la servante devinrent injectés de sang et sa peau devint toute blanche, parsemée de pustules et de plaques noires. Le cri de l'odalisque fut si aigu, si fort, qu'on l'entendit partout dans le palais. La reine la souleva par la gorge sans le moindre effort, serrant de plus en plus. Les yeux de la pauvre femme semblaient vouloir exploser tant la poigne était solide et ferme. La reine se dirigea vers la fenêtre de son balcon, situé à quelques mètres du sol. La chute n'allait pas la tuer, mais elle briserait forcément les jambes de cette pauvre femme, faisant d'elle une proie facile pour les animaux sauvages qui rôdait parfois autour du palais. Eryn lança la servante par-dessus la balustrade de pierre et se retourna vers les autres servantes. Ses iris devinrent entièrement fuchsia et une forte explosion se fit sentir derrière la porte. Les gardes en face de celle-ci sentirent une immense chaleur leur lécher le dos. Ils frémirent de peur.

Les soldats entendirent leur maîtresse les appeler. L'un d'eux ouvrit doucement la porte, qui était brûlante, et entra en tremblant dans la pièce. Il y avait des gravats et des pierres partout. Un mur entier était presque tombé sur le sol, le balcon était complètement détruit. Dans le coin gauche, le garde aperçut les servantes. Elles avaient quelques égratignures. Mis à part le fait qu'elles tremblaient comme des feuilles et qu'elles semblaient avoir eu la peur de leur vie, tout allait bien. À croire que l'impératrice les avait épargnées.

 

— Nettoyer tout, je vous prie. Il serait bien triste de laisser cette salle dans cet état. Et je veux que vous reconstruisiez cette salle. Vous m'avez bien compris ? Questionna Eryn en fixant la sentinelle.

— Bien, votre majesté, puis-je demandé à votre grandeur pour quand doit être prêt ce mur ?

—Pour hier ! Ragea la reine.

 

L'homme s'inclina et alla chercher d'autres personnes ainsi que le matériel nécessaire pour nettoyer la pièce.

Pendant ce temps, dans les appartements de Damien, une chose plutôt insolite se passait. L'assassin d'Eryn était en grande conversation avec un orbe gros comme sa tête et irradiant d'une couleur verdâtre et froide. Il ne voyait rien, il entendait seulement.

 

 — Je vous répète que je ne peux pas faire une chose pareille.

— Tu n'as pas le choix d'obéir, n'oublies pas notre entente.

— Je ne l'oublie pas, mais ce que vous me demandez est impossible.

— Ce que je te demande est bien simple pourtant. Tu dois simplement l'éliminée.

— Je ne peux pas faire une chose pareille, pas contre ça.

 

La pierre devint soudainement rouge sombre. La colère émanant de la pierre terrifia l'assassin, normalement sans peur.

 

— Je te demande simplement de la tuée, alors obéie ! Ordonna la voix.

 

Et puis plus rien. La sphère devint inanimée, l'assassin soupira. Dans quel bourbier s'était-il embarqué ? Il termina de préparer ses affaires et sortit de ses appartements. En sortant, Damien sentit la puissante secousse de l'explosion et cela le fit sourire. Apparemment, l'Enchanteresse était de meilleure humeur que tout à l'heure. L'assassin poursuivit son chemin. Il ordonna au garde présent de descendre le pont et sortit du château. Son aventure pour anéantir le petit obstacle rencontré par la reine allait enfin commencer.